vendredi 18 mars 2011

Wattao (FaFn) : “Beaucoup de Fds nous ont rejoint”

Après plus de trois mois passés à Abidjan, auprès de ses hommes dans le cadre de la sécurisation de l’hôtel du Golf, Ouattara Issiaka dit ‘’Wattao’’, chef d’état-major adjoint des Forces armées des Forces nouvelles (FaFn) est de retour à Bouaké pour ensuite rallier la ville de Séguéla où il assure par ailleurs les fonctions de commandant du groupement tactique 5.


Bien avant son départ, Wattao s’est prêté à nos questions sur son retour, la présence à Abobo du commando invisible et il a invité les éléments Fds-ci qui sont encore indécis à regagner le camp du président élu, Alassane Ouattara.


Vous êtes de retour à Bouaké, quelles sont les nouvelles ?
Les nouvelles sont très bonnes. Comme on le dit, le capitaine hors de l’eau n’est pas un capitaine. Je me retrouve à Bouaké pour continuer le travail. Nous sommes maintenant une force républicaine et, il est temps d’aborder une autre stratégie de combat. C’est pourquoi, aujourd’hui, je suis revenu dans la zone pour retrouver mes hommes et continuer le combat. Je profite de l’occasion que vous m’offrez pour saluer tous nos commandants de zones pour le travail abattu sur le terrain pendant huit ans, parce qu’il faut le reconnaître, ça n’a pas été facile.

Quel est le moral de vos éléments restés sur place à Abidjan ?
Le moral est très haut compte tenu de ce qui se passe à Abobo. Personnellement, je leur tire mon chapeau parce que les gens ont dit qu’ils ne mangeaient pas et pourtant nous sommes à l’aise là-bas.

Pendant que vous étiez à Abidjan, beaucoup de rumeurs ont circulé à votre sujet. Un commentaire ?
On ne peut pas empêcher quelqu’un de dire ce qu’il pense, comme on ne peut pas empêcher quelqu’un de rêver. Mais, quand toi-même tu sais que tu es serein, tu es en paix avec ta conscience. Si tu ne te reproches rien, tu n’as rien à craindre. Et, c’est mon cas, aujourd’hui. Je suis serein. Tout ce que je fais, mon chef hiérarchique est au courant. Comme le Premier ministre est au courant de tout ce que je fais, je n’ai rien à me reprocher. Je suis tranquille et il faut laisser les gens raconter leur vie. Comme on le dit, je leur pardonne. Il faut pardonner parce que tout le monde ne sait pas ce qu’il fait. Moi, je suis sur mon droit chemin et je vous rassure, cette position m’a permis de savoir qui je suis. Cela a permis de savoir qui est vraiment Wattao, et qu’il est important. Parce que quand tu n’es pas important, on ne parle pas de toi. C’est quand tu peux finir quelque chose qu’on parle de toi. Cela m’a ragaillardi. Cela a raffermi ma position.

Quels sont vos rapports avec le président de la République, Alassane Dramane Ouattara ?
C’est mon président. Moi je suis un militaire, un soldat. Je ne peux pas avoir d’autres rapports avec lui, ni avec le Premier ministre, que des rapports de travail. Ils m’ordonnent, j’exécute.

Cela dit, quels sont vos rapports avec vos amis d’hier, Blé Goudé et Philippe Mangou ?
Depuis le début de la crise post-électorale, nous avons coupé les liens. Le mercredi avant la marche qui devait conduire le Premier ministre à la RTI (Radiodiffusion-Télévision ivoirienne, Ndlr), le général Mangou m’a contacté parce qu’on avait récupéré leur 12,7 mm avec quelques matériels. Apres cela, on a coupé les liens. Il ne faut pas voir la vérité et accepter de suivre le mensonge. Nous avions décidé d’aller ensemble avec eux parce que nous avions une mission bien déterminée, à savoir les inciter à aller aux élections. Et, nous avons réussi cette mission. Certains n’ont pas compris et ils nous ont traités de tous les noms. Aujourd’hui, je peux dire que la mission a été accomplie. L’élection a été bien organisée et on sait qui a gagné. Le peuple a choisi, il faut que tout le monde s’aligne. J’ai été étonné de l’attitude de Philippe Mangou, général de corps d’armée, qui a pensé que le mensonge pouvait l’emporter sur la vérité. C’était vraiment difficile. Aujourd’hui, il est en train de récolter les pots cassés. Demain, il va payer cher, parce qu’il a trahi la nation. Concernant Blé Goudé, on a fait une mission de paix ensemble et aujourd’hui, s’il ne veut pas suivre ce chemin, je le laisse continuer. Moi, je ne suis pas politicien, je suis militaire. Si j’étais avec eux, chacun allait connaître ma position. Je n’allais jamais rester au Golf, j’allais les rejoindre. Je suis toujours avec mes amis d’hier et nous combattons ensemble. J’espère qu’ils vont comprendre qu’ils sont dans une aventure sans issue. Il vaut mieux retourner à la maison et rentrer dans la République.

Abidjan s’embrase de plus en plus, d’aucuns accusent les Forces nouvelles d’être derrière le commando invisible, que répondez-vous ?
C’est vous qui m’informez. Je sais qu’il y a des combats qui se déroulent à Abobo. Et, ce que je peux en dire c’est que quand tu es acculé jusqu’à un certain niveau et que tu as le dos au mur, tu te retrouves face à ton destin. C’est ce qui est arrivé à la jeunesse d’Abobo. A force de les acculer, aujourd’hui, ils cherchent à se défendre et moi je loue leur courage et si je peux les appuyer, je les appuierai comme il se doit.

Avez-vous pu établir un contact avec ce commando invisible ?
Pour le moment, je n’ai aucun contact avec eux mais je suis en train de chercher les contacts et je suis sûr que nous nous croiserons.

Récemment des proches de IB, notamment Drigoné Bi Faya et Timité Ben Rassoul, ont fait des déclarations en lui attribuant la paternité du commando invisible. Quel est votre commentaire ?
Je ne savais pas qu’IB avait encore des hommes, mais si ce sont ses hommes, nous attendons de voir. Si c’est vérifié, je dirai que c’est une aventure. IB n’a jamais rien terminé, c’est un opportuniste. Alassane Dramane Ouattara a été élu, si nous le laissons pour aller prendre IB, c’est que nous voulons plonger la Côte d’Ivoire dans le chaos. Que chacun connaisse sa place pour que nous évitions de nous emmerder. J’ose croire qu’il sera habité par la sagesse pour ne pas, encore une fois, mettre la vie de certains jeunes en danger inutilement. Il ne pourra jamais diriger la Côte d’Ivoire, alors là, jamais. Il faut qu’il arrête.

Un rapprochement est-il encore possible ?
Il n’y a pas de rapprochement entre lui et moi. Vous savez que ma tête est mise à prix par IB. Quel rapprochement peut-il avoir entre lui et moi ? C’est ça le problème et je ne peux pas laisser M. Alassane Ouattara pour aller suivre IB. Tant qu’il ne comprendra pas qu’il est militaire et qu’il doit se mettre au service de la Côte d’Ivoire, en faisant la sécurité, en défendant le pays et non pour devenir président, nous ne pourrons jamais nous entendre.

La semaine dernière, il y aurait eu des tirs à Séguéla. Qu’est-ce qui s’est réellement passé ?
A Séguéla, il n’y a rien eu. Les gens ont toujours trouvé des choses pour vouloir déstabiliser les Forces nouvelles. Lorsqu’il y a une petite mésentente entre deux éléments, nos ennemis extrapolent cela comme si le ciel est tombé à Séguéla. Il y a des choses plus graves à Abidjan et on n’en fait pas cas. A dire vrai, il n’y a rien eu à Séguéla. Je suis venu et je vais prendre ma place là-bas.

Parlant de Séguéla, un quotidien de la place a fait cas du retour de Koné Zakaria pour reprendre sa place en tant que Commandant de zone de cette localité…
Vous l’avez vu ? Vous savez qu’il y a parmi vous, des journalistes qui racontent n’importe quoi. Si Koné Zakaria veut venir, qu’il vienne. Il sera le bienvenu. C’est la même lutte qui continue. Je n’ai pas de problème avec lui. Celui qui pense qu’il peut enlever Gbagbo pour que Alassane Ouattara exerce son pouvoir, qu’il vienne et je vais le soutenir. C’est ça mon objectif aujourd’hui, c’est-à-dire comment installer le président démocratiquement élu. Le reste, je m’en fou. Et puis, je suis chef d’état-major adjoint, en principe mon poste n’est pas Séguéla. Si je trouve quelqu’un qui est capable de gérer Séguéla, je lui cède le poste puis je viens m’asseoir à l’état-major. Pour le moment, je suis à mon poste.

Jusqu’à présent aucune note de l’état-major ne vous a été signifiée à cet effet ?
En tout cas, jusqu’à présent, je n’ai vu aucune note de l’état-major ou du Premier ministre, ministre de la Défense, m’informant de cela. Donc, je continue mon travail.

Votre retour à Séguéla est prévu pour quand ?
Mon retour à Séguéla est prévu pour ces temps-ci. Je me suis un peu reposé ici, à Bouaké, parce que Séguéla, c’est le front.

C’est-à-dire ?
Séguéla est sur la ligne de front. Après Séguéla, vous avez Vavoua et après, c’est Daloa qui est là. Il se pourrait qu’à partir de Daloa, ils nous attaquent comme ils l’ont fait à Danané. S’ils nous attaquent, c’est l’occasion pour nous d’aller jusqu’à San-Pedro et jusqu’à Abidjan.

Concernant les lignes de front, on sait que votre poudrière a pris feu à Séguéla. Pensez-vous avoir les moyens matériels nécessaires pour tenir ?
Ce n’est pas ma poudrière qui a pris feu. C’est plutôt l’armement qui était au poste de garde. Vous savez, dans un service de garde, il y a toujours des armes à feu. C’est ce qui a pris feu. Ceux qui disent que ma poudrière a pris feu, qu’ils essaient d’attaquer Séguéla et ils verront si c’est avec des bois ou des cailloux que je me défendrai. Je souhaite qu’on essaie de me provoquer.

Après le sommet de l’Union Africaine qui confirme l’élection d’Alassane Ouattara à la présidence de la République, Laurent Gbagbo refuse toujours de quitter le pouvoir. Les Ivoiriens souffrent et le pays s’embrase. Que doit-on attendre des Forces nouvelles ?
Si on savait que Gbagbo allait se comporter ainsi, on ne partirait jamais comme ça à Abidjan. On serait parti avec l’esprit de guerre. Nous ne sommes pas partis avec la guerre dans la tête, parce que nous croyions en ce monsieur qui a fait croire à toute la nation que s’il perdait les élections, il céderait le pouvoir pacifiquement. Ce que les Ivoiriens peuvent attendre des Forces nouvelles, c’est que nous travaillons pour mettre Alassane Ouattara au pouvoir. Nous allons l’installer au palais avec l’accord et le soutien du Premier ministre, ministre de la Défense, chef des Forces nouvelles. C’est pour vous dire que M. Alassane Ouattara sera bientôt au pouvoir. Aujourd’hui nous ne sommes plus des rebelles. Donc personne ne peut nous accuser si on fait une offensive pour libérer Abidjan. Personne ne peut nous en vouloir. Mais avant, si on le faisait, on allait avoir à dos le monde entier.

Il ya des éléments de l’ancienne force gouvernementale qui veulent vous rejoindre…
Il y a beaucoup d’éléments des Fds qui nous ont déjà rejoints.


Mais il y en a qui sont encore septiques ?
Qu’ils restent dans leur scepticisme. Quand nous serons au pouvoir, ils resteront toujours septiques.


Ils ont sans doute peur pour leur sécurité…
De quelle sécurité parle-t-on ? Nous avons tous risqué nos vies. Celui qui ne risque rien n’a jamais rien. Il faut qu’ils acceptent de risquer.

Le jeudi 03 mars dernier, des femmes qui manifestaient pacifiquement à Abobo ont été massacrées par les forces pro-Gbagbo. Comment réagissez-vous face à cette barbarie ?
Vous savez, il faut beaucoup faire attention à la femme. Et Laurent Gbagbo n’a pas compris cela. Il s’est attaqué aux femmes. Depuis qu’ils ont tué ces sept femmes, les choses s’accélèrent. Et ça ira plus vite que prévu. Parce que la femme, elle est sacrée. Tirer sur des femmes aux mains nues. Que voulez-vous que Dieu fasse pour vous encore ? La Femme, c’est elle qui donne la vie. C’est comme s’ils ont bafoué nos mamans, c’est-à-dire eux-mêmes leur maman. Pensez-vous que de vrais Ivoiriens peuvent aller tuer leurs sœurs ivoiriennes ? C’est pour vous dire que c’est le déclin qui est arrivé. Et rien ne peut arrêter cela. Mais moi je dis qu’il n’est jamais tard pour bien faire. Ces militaires peuvent prendre leurs responsabilités, aujourd’hui, comme il se doit. Ceux qui ne veulent pas prendre leurs responsabilités, tant pis pour eux. Avec ou sans eux, nous irons jusqu’au pouvoir. Donc il faut qu’ils nous rejoignent maintenant pour qu’on parte ensemble, parce que nous sommes sur le bon chemin.
Tout est filmé, aujourd’hui. Ce qui est marrant, même quand on brûle quelqu’un, on filme. Ces images vont parler et demain, les coupables vont répondre de leurs actes. Ceux qui ont tiré sur ces femmes ont été filmés. Le char a été filmé. On connait ceux qui étaient dans ce char, ce jour-là. Demain, ils répondront. Il faut que chacun soit conscient aujourd’hui de l’acte qu’il pose. Comme Gbagbo lui-même l’a dit, quand on t’envoie, il faut savoir t’envoyer. Comme ces derniers n’ont pas su s’envoyer, ils vont répondre demain. Et je suis sûr et certain que ceux qui ont commis ce crime se disent que c’est la fin de leur carrière. Je ne sais pas ce qu’ils vont faire pour redorer leur blason. Mais comme on dit souvent que quand tu fais du bien, le mal que tu as commis auparavant peut être à moitié pardonné, on verra. Je sais que certains ont compris. Chaque jour que Dieu fait, on s’appelle et beaucoup vont nous rejoindre.

Quel message lancez-vous à l’endroit des populations, de vos frères d’armes des Fds-Ci encore indécis ? Et aussi à l’endroit des miliciens et des mercenaires ?
D’abord, je voudrais lancer un appel à la communauté internationale pour leur demander de faire en sorte que les deux journalistes de TVNP, injustement emprisonnés à la MACA, soient libérés car, ce ne sont pas des militaires. Ce sont de simples journalistes qui se rendaient à Abidjan dans le cadre de leurs activités professionnelles. Aux populations ivoiriennes, je dirai tout simplement que chaque peuple a une histoire. Les Etats-Unis et la France ont eu leur histoire. C’est le moment pour la Côte d’Ivoire de vivre son histoire. Chacun doit faire des sacrifices pour ramener la paix en Côte d’Ivoire. La victoire du président Alassane Ouattara est incontestable. Comme on le dit, nous sommes majoritaires et, avec cette majorité nous allons prouver aux yeux du monde que la Côte d’Ivoire peut résoudre ses problèmes. Si on veut compter sur la communauté internationale, elle ne va jamais agir. C’est à nous même Ivoiriens de nous lever comme un seul homme pour aller mettre le président Ouattara au pouvoir, pour qu’il nous ramène la paix et le développement. On sait qu’avec ce monsieur, la Côte d’Ivoire va aller de l’avant. Nous allons tout faire pour qu’Alassane Ouattara s’installe au pouvoir pour qu’il donne la joie de vivre aux Ivoiriens. A nos frères militaires indécis, ce n’est pas le moment de l’être. Il faut risquer, car celui qui ne risque rien, n’a jamais rien. Tu ne peux pas refuser de risquer et attendre la gloire. Tu ne peux pas t’asseoir dans ton salon et attendre quelque chose pour être heureux. Ça passe ou ça casse. Nous avons risqué pour être là aujourd’hui. Et, nous allons risquer encore pour installer le président Alassane Ouattara au pouvoir. Ce n’est plus une affaire de parti. C’est une affaire de la Côte d’Ivoire. Il faut qu’on se lève comme un seul homme pour dire à ce monsieur de quitter le pouvoir. On peut le faire si on le veut. Mais si on veut calculer nos intérêts, nous n’allons jamais y arriver. Je le dis, même s’il reste deux personnes, elles vont installer le président Alassane Ouattara au pouvoir. Car c’est la volonté de Dieu, on n’y peut rien. Comment M. Gbagbo peut-il s’en sortir ? Dites-le moi, car je ne vois pas. Non jamais. Le président Alassane Ouattara a gagné partout, même dans son village à Gagnoa. Ainsi qu’à Abidjan.
A l’endroit des miliciens et mercenaires, il n’y a pas deux mots à dire : nous allons les mater. Je le redis, nous allons les mater.
En ce qui concerne les généraux fidèles à Laurent Gbagbo, moi je les considère comme des généraux perdus, des généraux inconscients. Je le dis haut et fort et je l’assume. Ils sont indignes. Ils ne doivent pas porter le galon de général. Ils ont trahi le peuple. L’armée est avec le peuple, elle n’est pas contre le peuple. On a vu en Egypte, en Tunisie où l’armée a refusé de tirer sur son peuple. Mais si cette armée cautionne des mercenaires pour venir tirer sur le peuple. Que nous diront-ils demain ? Cette armée est à reformer. Il faut une reforme totale et profonde de notre armée. Car, elle a failli à sa mission.
Quant à mes frères d’armes des forces républicaines, il faut qu’ils sachent que nous ne sommes plus des rebelles. Nous sommes des forces républicaines. On doit avoir un comportement républicain. Aujourd’hui, le président Alassane Ouattara a été élu pour redorer le blason de la Côte d’Ivoire. C’est à nous Forces républicaines de l’aider dans cette tâche. Donc on doit savoir marcher, savoir parler et poser des actes nobles à l’image du président Alassane Dramane Ouattara pour ne pas qu’il ait honte de nous demain. Je demande à mes frères de tenir bon, nous sommes déjà au bout du tunnel. Il nous reste deux voire trois semaines de courage tout au plus pour l’installer au pouvoir. Et nous serons tous heureux, ainsi que la Côte d’Ivoire et toute la sous région.

Interview réalisée à
Bouaké par Denis Koné

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